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Éclectisme des goûts : lecture, Histoire, défense, wargame, Star Wars. Des choses à partager et faire découvrir au gré de l'inspiration.

l’Agonie d’une monarchie – Autriche-Hongrie, 1914-1920, de Jean-Paul Bled

Mon voyage à Vienne en décembre dernier a suscité une vague d’achats sur l’histoire austro-hongroise. Mes visites du palais de la Hofburg, de la Crypte des Capucins, du château de Schönbrunn m’ont révélé une histoire fascinante (sur le plan littéraire, je recommande également la lecture du beau roman de Joseph Roth, la Marche de Radetzky). Charmé par cette ambiance viennoise unique, j’étais curieux d’élargir mes connaissances sur cet empire qui avait unifié l’Europe centrale sous le sceptre des Habsbourg. Parmi ces lectures, mon attention s’est portée sur l’Agonie d’une monarchie – Autriche-Hongrie, 1914-1920, de Jean-Paul Bled. L’objet du livre est dans le livre : le propos se concentre sur les dernières années de l’Empire austro-hongrois. En 450 pages, hors notes et bibliographie, Jean-Paul Bled nous montre comment la Première Guerre mondiale a tué la Double Monarchie.

Rétrospectivement, l’éclatement en 1918 de l’Empire austro-hongrois nous paraît une issue évidente de la Grande Guerre. Relique de l’Europe monarchique, le trône des Habsbourg était condamné à ne pas survivre à une défaite des Puissances centrales. La réalité est bien différente. Jean-Paul Bled nous montre que la fin de l’Empire austro-hongrois ne devient un but de guerre de l’Entente que fin 1917-début 1918. Jusque-là, les puissances alliées considèrent Vienne d’une part comme le garant de la stabilité en Europe centrale, d’autre part comme une barrière contre l’influence allemande dans cette région. Elles n’ont donc pas intérêt à voir les nationalités de l’Empire gagner leurs indépendances et s’ériger en autant d’Etats. En outre, l’Empire austro-hongrois est perçu comme le point d’entrée diplomatique des empires centraux. Une paix séparée avec Vienne verrait le flanc sud de l’Allemagne s’effondrer. La place de l’Empire austro-hongrois dans la Première Guerre mondiale n’est donc pas celle d’un partenaire mineur de l’Allemagne, voué à disparaître une fois vaincu.

L’Agonie d’une monarchie – Autriche-Hongrie, 1914-1920, de Jean-Paul Bled, prend la forme d’une histoire austro-hongroise de la Première Guerre mondiale. L’ouvrage aborde plusieurs thèmes : diplomatie, opérations militaires, situation économique, vie politique. Le style d’écriture de l’auteur est assez efficace et rend la lecture plutôt fluide. Le lecteur est rapidement pris dans ce qui est en effet une agonie désespérée. Durant ce lent naufrage, de nouvelles voies d’eau ne cessent de surgir. La survie de l’Empire ne semble alors provenir que d’un arrimage ferme à l’Allemagne. Cet arrimage se transforme en vassalisation de fait lorsque l’empereur Charles et ses ministres cèdent sans résister aux exigences de Berlin. Désormais vu comme le miroir de l’Allemagne en Europe centrale, l’Empire austro-hongrois n’est plus considéré comme un facteur de stabilité en Europe centrale. Son sort est scellé lorsque l’Entente reconnaît les comités nationaux au sein de l’empire.

Le propos est très intéressant et ouvre dans la conclusion quelques perspectives de réflexion lorsqu’il évoque l’Empire austro-hongrois comme, malgré ses défauts et ses contradictions internes, un projet fédérateur pour l’Europe centrale. Une telle idée est probablement discutable et serait peut-être très vite contredite par un spécialiste de cette région. Elle nous sort toutefois d’une vision de la Première Guerre mondiale habituellement centrée sur le front de l’Ouest. A ce titre, l’Agonie d’une monarchie – Autriche-Hongrie, 1914-1920, de Jean-Paul Bled, est une lecture utile et intéressante pour élargir son horizon.

Mars 2023

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